Pour cette nouvelle séance des «Vendredi Varda», nous vous proposons d’inaugurer avec nous le Ciné Varda, Ciné-Club thématique qui s’ouvre logiquement (et en hommage à Agnès) par un cycle dédié aux réalisatrices. La sélection sera faite avec le souhait de mettre en lumière des films et des voix longtemps minorisées et encore méconnues, considérant qu’à travers l’Histoire du Cinéma, on estime que moins de 10% des films ont été réalisés par des femmes. L’autre volonté dans la sélection et l’encadrement de l’événement est de mettre en question la spécificité du regard porté par ces réalisatrices sur le monde, la société, leur époque et leur pratique artistique à travers une analyse historique, esthétique et symbolique. L’initiative de ce premier cycle revient aux étudiantes de 1ère année en vidéographie : Laure Fesler, Najwa Hakiri, Sara Makni, Clara Mariani et Yasmine Touati.
Dans l’idéal, et en fonction du film pour ce cycle, chaque projection serait précédée d’un court-métrage surprise et suivie d’une rencontre avec les étudiantes organisatrices et un.e intervenant.e apportant une expertise particulière sur le long-métrage sélectionné, tout en gardant une volonté de légèreté, d’humour et de collectivité à cet événement qu’on espère régulier.
«Les Petites Marguerites» (1966) de Véra Chytilova (76’)
Film burlesque et irrévérencieux, Les Petites Marguerites passe toutes les conventions à
la moulinette, alternant couleur et noir et blanc, filtres monochromes, prises de vue réelles ou animées, mouvements incongrus de la caméra, et ainsi de suite. Il met en scène deux femmes, Marie I et Marie II qui, confrontées à leur ennui et la dépravation généralisée, cherchent à se distraire dans la Tchécoslovaquie du milieu des années 60. Décidant de vivre leur vie comme elles l’entendent, elles n’hésiteront pas à tout détruire sur leur passage. Réalisatrice et scénariste tchèque, Vera Chytilova est la première femme diplômée en réalisation de l’Ecole de cinéma de Prague. Contemporaine de Milos Forman, elle participe à l’éclosion de la Nouvelle Vague de son pays par ses courts puis longs métrages dont Les Petites Marguerites est le fleuron, et dont la liberté de ton annonce le Printemps de Prague avec deux ans d’avance. Controversé notamment à cause des scènes de gaspillage alimentaire, le film sera banni par le gouvernement sous prétexte de “dépeindre le dévergondage”. Chytilova réalise encore un long métrage en 1969, Le Fruit de Paradis, qui aggrave sa situation aux yeux des Soviétiques et l’empêche de réaliser d’autres films durant les années de plomb. Elle revient en force avec Le jeu de la Pomme en 1976, non sans avoir plaidé sa cause auprès du Président Gustav Husak, et continue – quoique difficilement – sa carrière de réalisatrice, ce même après la chute du Mur. Elle décède en 2014, restant avec Agnès Varda l’une des réalisatrices européennes les plus importantes du XXème siècle.